vendredi, 05 décembre 2008
Désirer et attendre le Sauveur
Désirer et attendre le Sauveur, telle est la spiritualité propre au temps de l'Avent, ce temps liturgique qui nous fait revivre tout l'itinéraire de l'Ancien Testament, depuis la chute originelle d'où découlent tous les malheurs de l'humanité. C'est ce long cri d'espérance de l'homme tombé dans le péché, mais qui sait cependant qu'il ne peut se passer de l'amitié divine et de son soutien :
Réveille ta puissance, Seigneur, et viens nous délivrer !
Viens, montre-nous ton visage, et nous serons sauvés ! (Ps 79 3-4)
L'homme pécheur éprouve de besoin de "rentrer en grâce" avec Dieu
Conscients de leur faiblesse, de leur impuissance à faire le bien, les hommes, éprouvent le besoin de "rentrer en grâce" avec Dieu : ils L'appellent à leur secours, avec la totale confiance que Lui seul pourra les sortir de leur misère :
Dieu de toute force, reviens ! et nous ne nous éloignerons plus de Toi.
Rends-nous la vie, et nous invoquerons ton Nom. (Ps 79, 15)
Dieu a promis aux hommes de leur envoyer un Sauveur
Cette promesse a rendu courage à des générations de croyants, qui ont puisé là toute la force pour vivre dans la fidélité au Seigneur.
Voici que Dieu lui-même viendra et Il vous sauvera. (Is 35, 4)
Le nom de Jésus signifie "DIEU SAUVE" : "C'est Lui que Dieu, dans sa Miséricorde, a promis aux hommes pour être le Sauveur du genre humain perdu par le péché,
pour que sa lumière instruise les ignorants,
que sa sainteté justifie les impies,
que sa force fortifie les faibles..." (ancienne préface de l'Avent)
Le sens du péché
On ne peut rien comprendre au sens de ce temps de l'Avent si on ne le relie pas au sens du péché : c'est le péché qui nous éloigne – ou, même, nous sépare - de Dieu.
Vraiment, je ne comprends pas ce que je fais : le bien que je veux, je ne le fais pas,
et le mal que je ne veux pas, je le commets… (Rm 7, 15, 24)
et c'est du péché que le Sauveur vient nous délivrer :
Demain la méchanceté de la terre sera effacée, et le Sauveur du monde sera notre Roi.
(Esd 16, 5)
Nous avons besoin de Dieu
Cette intervention de Dieu dans nos vies, nous la désirons, nous savons que nous en avons besoin pour qu'elle nous aide à devenir véritablement "à l'image de Dieu et à sa ressemblance"...
C'est cette action de Dieu en nous qui nous apporte la lumière dont nous avons besoin pour avancer sur le chemin qui nous mène à Lui.
Ta parole est une lampe devant mes pas, une lumière qui éclaire mon chemin… (Ps 118, 105)
Voici que notre Seigneur viendra avec puissance, et illuminera les yeux de ses serviteurs.
(Is 40, 10)
Et Jésus dira :
Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres,
mais il aura la lumière de la vie.(Jn 8, 12)
Puisque voici venir le temps du salut, préparons-nous :
La nuit est avancée, le jour est tout proche.
Rejetons donc les oeuvres de ténèbres, et revêtons les armes de lumière... (Rm 13, 12)
"Revêtir les armes", cela veut bien dire qu'il s'agit d'un combat. Oui, la vie chrétienne ne va jamais sans un combat pour faire prévaloir en nous le bien sur le mal. Et pour cela, nous avons bien besoin de la lumière et de la grâce de notre Sauveur.
N'est-ce pas là le programme qui nous est proposé pendant ce temps de l'Avent, pour préparer sa venue dans nos coeurs ?
Quitter les ténèbres et venir à la lumière
Lumière, ténèbres... le choix nous est laissé :
La vraie lumière, qui éclaire tout homme, est entrée dans le monde.
Il était dans le monde, et le monde a été fait par lui, et le monde ne l'a pas reconnu.
Il est venu chez les siens, et les siens ne l'ont pas reçu. (Jn 1, 9-11)
La lumière est venue dans le monde,
et les hommes ont préféré les ténèbres à la lumière, parce que leurs oeuvres étaient mauvaises. (Jn 3, 19)
"Il est venu chez les siens, et les siens ne l'ont pas reçu"...
N'est-ce pas cela qui s'est passé dans la nuit de Noël, à l'arrivée de Joseph et Marie à Bethléem ?
"Il n'y avait pas de place pour eux à l'hôtellerie" (Lc 2, 7)
Si les gens de Bethléem - et plus encore, par la suite, la plupart des contemporains de Jésus - ne l'ont pas "reconnu", c'est parce qu'ils ont fermé leur coeur à son enseignement, ils n'ont pas voulu Le recevoir. Mais pourquoi ?
Le souci du monde et la séduction de la richesse étouffent la Parole, qui devient stérile.
(Mt 13, 22 - Evangile du Semeur)
Ceci, hélas, n'est pas seulement un tableau du temps passé... Depuis, combien refusent de Le recevoir, et pour les mêmes raisons ?
Mais, à l'inverse, d'autres accueillent avec joie sa Parole...
"Mais à tous ceux qui l'ont reçu, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu"… (Jn 1, 12)
Si quelqu'un m'aime, il gardera ma parole, et mon Père l'aimera,
et nous viendrons en lui, et nous ferons en lui notre demeure. (Jn 14, 23)
Celui qui accueille la Parole de Dieu, c'est celui qui "fait la volonté de Dieu" : celui-là sera aimé de Dieu, et aura la joie de recevoir en lui la Présence divine, par l'état de grâce.
"Nous ferons en lui notre demeure" : accueillir Jésus en nous ? mais c'est là la vraie joie de Noël.
Cette Présence est infiniment précieuse, aussi faut-il la conserver avec le plus grand soin.
Pour rester attentifs à la Présence de Dieu
Le silence intérieur
Mais attention ! Si grande et forte qu'elle soit, cette Présence de Dieu dans l'âme est fragile : elle demande que, par le silence, le recueillement, nous restions plus attentifs à Dieu qu'à tout autre chose, et surtout à tout ce qui se passe au dehors.
Il est bon d'attendre dans le silence le salut de Dieu. (Lm 3, 26)
La Présence de Dieu dans l'âme n'aime pas le bruit du dehors, ni l'agitation du "monde"...
Et Dieu sait quelle agitation le monde déploie chaque année à l'approche de la fête de Noël ! Aussi bien, n'est-ce pas là le "vrai" Noël.
Se préparer à la fête de Noël dans une famille chrétienne, c'est bien autre chose que ce que nous proposent, au dehors, les vitrines, les guirlandes, les publicités de toutes sorte pour réveillonner...
''N'aimez pas le monde, ni rien de ce qui est dans le monde.
Si quelqu'un aime le monde, l'amour du Père n'est pas en lui.
Car rien de ce qui est dans le monde - convoitise de la chair, convoitise des yeux, ostentation de la richesse,- ne vient du Père ; cela vient du monde.
Or, le monde passe, avec sa convoitise ;
mais celui qui fait la volonté de Dieu demeure éternellement. (1 Jn 2, 15-17)
En arrivant à Bethléem, Joseph et Marie n'ont pas été accueillis : au tapage de l'hôtellerie bruyante, l'Enfant-Jésus a préféré venir au monde "incognito", dans le silence de la crèche.
Ce silence ne convenait-il pas mieux au mystère de la Nativité d'un Dieu qui se fait homme ?
De même, maintenant, la vraie joie de Noël est aussi discrète, silencieuse, et détachée des choses matérielles que le monde est agité, tapageur, centré seulement sur les plaisirs matériels... Cela ne veut pas dire que nous allons devoir supprimer ces joies temporelles, mais seulement les tenir à leur juste place.
Ne vous conformez pas au monde présent... (Rm 12, 2)
La fidélité au devoir d'état
Ce qui nous est demandé aussi, pour conserver précieusement en nous cette Présence, c'est de nous appliquer bien faire toutes choses, sous le regard de Dieu : ce qui revient à dire "garder la Parole de Dieu" ou encore : faire sa volonté. C'est cela qui nous guidera dans les choix que nous avons continuellement à faire dans la vie pratique.
…mais transformez-vous par le renouvellement de votre esprit,
afin de pouvoir discerner quelle est la volonté de Dieu,
ce qui est bon, ce qui Lui est agréable, ce qui est parfait. (Rm 12, 2)
C'est ainsi que cette Présence divine pourra grandir en nous… et que nous aurons quelque chose à offrir à l'Enfant Jésus de la Crèche.
Que vous mangiez, que vous buviez et quoi que vous fassiez,
faites tout pour la gloire de Dieu ! (1 Co 10, 31)
Source
Illustration
Le polyptiquede Notre-Dame-de-Beauvoir.
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lundi, 31 mars 2008
Bienheureuse celle qui a cru...
Aussitôt après le récit de l'Annonciation, l'evangéliste Luc nous conduit, sur les pas de la Vierge de Nazareth, vers «une ville de Juda» (Lc 1, 39). D'après les érudits, cette ville devrait être l'Ain-Karim d'aujourd'hui, située dans les montagnes, non loin de Jérusalem. Marie y alla «en hâte» pour rendre visite à Elisabeth, sa parente. Sa visite se trouve motivée par le fait qu'à l'Annonciation Gabriel avait nommé Elisabeth d'une manière remarquable, elle qui, à un âge avancé, grâce à la puissance de Dieu, avait conçu un fils de son époux Zacharie: «Elisabeth, ta parente, vient, elle aussi, de concevoir un fils dans sa vieillesse, et elle en est à son sixième mois, elle qu'on appelait la stérile; car rien n'est impossible à Dieu» (Lc 1, 36-37). Le messager divin s'était référé à ce qui était advenu en Elisabeth pour répondre à la question de Marie: «Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d'homme?» (Lc 1, 34). Oui, cela adviendra justement par la «puissance du Très-Haut», comme et plus encore que dans le cas d'Elisabeth.
Marie, poussée par la charité, se rend donc dans la maison de sa parente. A son entrée, Elisabeth répond à sa salutation et, sentant l'enfant tressaillir en son sein, «remplie d'Esprit Saint», à son tour salue Marie à haute voix: «Bénie es-tu entre les femmes, et béni le fruit de ton sein!» (cf . Lc 1, 40-42 ). Cette exclamation ou cette acclamation d'Elisabeth devait entrer dans l'Ave Maria, à la suite du salut de l'ange, et devenir ainsi une des prières les plus fréquentes de l'Eglise. Mais les paroles d'Elisabeth sont encore plus significatives dans la question qui suit: «Comment m'est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur?» (Lc 1, 43). Elisabeth rend témoignage à Marie: elle reconnaît et elle proclame que devant elle se tient la Mère du Seigneur, la Mère du Messie. Le fils qu'Elisabeth porte en elle prend part, lui aussi, à ce témoignage: «L'enfant a tressailli d'allégresse en mon sein» (Lc 1, 44). Cet enfant sera Jean-Baptiste qui, au Jourdain, montrera en Jésus le Messie.
Dans la salutation d'Elisabeth, tous les mots sont lourds de sens; cependant ce qu'elle dit à la fin semble d'une importance primordiale «Bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur!» (Lc 1, 45) . On peut rapprocher ces mots du titre «pleine de grâce» dans la salutation de l'ange. Dans l'un et l'autre de ces textes se révèle un contenu mariologique essentiel c'est-à-dire la vérité sur Marie dont la présence dans le mystère du Christ est devenue effective parce qu'elle «a cru». La plénitude de grâce, annoncée par l'ange, signifie le don de Dieu lui-même; la foi de Marie, proclamée par Elisabeth lors de la Visitation, montre comment la Vierge de Nazareth a répondu à ce don.
13. Comme l'enseigne le Concile, «à Dieu qui révèle est due "l'obéissance de la foi" (Rm 16, 26; cf. Rm 1, 5; 2 Co 10, 5-6), par laquelle l'homme s'en remet tout entier et librement à Dieu» . Cette définition de la foi trouve en Marie une réalisation parfaite. Le moment «décisif» fut l'Annonciation, et les paroles mêmes d'Elisabeth: «Bienheureuse celle qui a cru» se rapportent en premier lieu à ce moment précis .
A l'Annonciation en effet, Marie, s'est remise à Dieu entièrement en manifestant «l'obéissance de la foi» à celui qui lui parlait par son messager, et en lui rendant «un complet hommage d'intelligence et de volonté» . Elle a donc répondu de tout son «moi» humain, féminin, et cette réponse de la foi comportait une coopération parfaite avec «la grâce prévenante et secourable de Dieu» et une disponibilité parfaite à l'action de l'Esprit Saint qui «ne cesse, par ses dons, de rendre la foi plus parfaite» .
Annoncée à Marie par l'ange, la parole du Dieu vivant la concernait elle-même: «Voici que tu concevras en ton sein et enfanteras un fils» (Lc 1, 31). En accueillant cette annonce, Marie allait devenir la «Mère du Seigneur» et le mystère divin de l'Incarnation s'accomplirait en elle: «Le Père des miséricordes a voulu que l'Incarnation fût précédée par une acceptation de la part de cette Mère prédestinée» . Et Marie donne ce consentement après avoir entendu toutes les paroles du messager. Elle dit: «Je suis la servante du Seigneur; qu'il m'advienne selon ta parole!» (Lc 1, 38). Ce fiat de Marie -«qu'il m'advienne»- a déterminé, du côté humain, l'accomplissement du mystère divin. Il y a une pleine harmonie avec les paroles du Fils qui, suivant la Lettre aux Hébreux, dit au Père en entrant dans le monde: «Tu n'as voulu ni sacrifice ni oblation, mais tu m'as façonné un corps... Voici, je viens... pour faire, ô Dieu, ta volonté» (He 10, 5-7). Le mystère de l'Incarnation s'est accompli lorsque Marie a prononcé son fiat: «Qu'il m'advienne selon ta parole!» rendant possible, pour ce qui la concernait dans le plan divin, la réalisation du dessein de son Fils.
Marie a prononcé ce fiat dans la foi. Par la foi, elle s'est remise à Dieu sans réserve et «elle se livra elle-même intégralement, comme la servante du Seigneur, à la personne et à l'œuvre de son Fils» . Et ce Fils, comme l'enseignent les Pères, elle l'a conçu en son esprit avant de le concevoir en son sein, précisément par la foi! C'est donc à juste titre qu'Elisabeth loue Marie «Bienheureuse celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur!». Ces paroles ont déjà été réalisées: Marie de Nazareth se présente sur le seuil de la maison d'Elisabeth et de Zacharie comme la mère du Fils de Dieu. Telle est l'heureuse découverte d'Elisabeth: «La mère de mon Seigneur vient à moi!».
14. Par conséquent, on peut aussi comparer la foi de Marie à celle d'Abraham que l'Apôtre appelle «notre père dans la foi» (cf. Rm 4, 12). Dans l'économie du salut révélée par Dieu, la foi d'Abraham représente le commencement de l'Ancienne Alliance; la foi de Marie à l'Annonciation inaugure la Nouvelle Alliance. Comme Abraham, «espérant contre toute espérance, crut et devint ainsi père d'une multitude de peuples» (cf. Rm 4, 18), de même Marie, au moment de l'Annonciation, après avoir dit sa condition de vierge («Comment cela sera-t-il, puisque je ne connais pas d'homme?»), crut que par la puissance du Très-Haut, par l'Esprit Saint, elle allait devenir la Mère du Fils de Dieu suivant la révélation de l'ange: «L'être saint qui naîtra sera appelé Fils de Dieu» (Lc 1, 35).
Cependant les paroles d'Elisabeth: «Bienheureuse celle qui a cru» ne se rapportent pas seulement à ce moment précis de l'Annonciation Assurément, cela représente le point culminant de la foi de Marie dans son attente du Christ, mais c'est aussi le point de départ, le commencement de tout son «itinéraire vers Dieu», de tout son cheminement dans la foi. Et sur cette route, d'une manière éminente et véritablement héroïque - et même avec un héroïsme dans la foi toujours plus grand-s'accomplira l'«obéissance» à la parole de la révélation divine, telle qu'elle l'avait professée. Et cette «obéissance de la foi» chez Marie au cours de tout son itinéraire aura des analogies étonnantes avec la foi d'Abraham. Comme le patriarche du Peuple de Dieu, Marie de même, «espérant contre toute espérance, crut» tout au long de l'itinéraire de son fiat filial et maternel. Au cours de certaines étapes de cette route spécialement, la bénédiction accordée à «cellé qui a cru» sera manifestée avec une particuliere évidence. Croire veut dire «se livrer» à la verite même de la parole du Dieu vivant, en sachant et en reconnaissant humblement «combien sont insondables ses décrets et incompréhensibles ses voies» (Rm 11, 33). Marie qui par la volonté éternelle du Très-Haut, s'est trouvée, peut-on dire, au centre même de ces «voies incompréhensibles» et de ces «décrets insondables» de Dieu, s'y conforme dans l'obscurité de la foi, acceptant pleinement, le cœur ouvert tout ce qui est prévu dans le plan divin.
15. Quand Marie, à l'Annonciation, entend parler du Fils dont elle doit devenir mère et qu'elle «appellera du nom de Jésus» ( = Sauveur), il lui est aussi donné de savoir que «le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père», qu'il «régnera sur la maison de Jacob pour les siècles et son règne n'aura pas de fin» (Lc 1, 32-33). C'est dans cette direction que s'orientait toute l'espérance d'Israël. Le Messie promis doit être «grand», le messager céleste annonce aussi qu'il «sera grand» -grand par le nom de Fils du Très-Haut ou parce qu'il reçoit l'héritage de David. Il doit donc être roi, il doit régner «sur la maison de Jacob». Marie a grandi au milieu de cette attente de son peuple: pouvait-elle saisir, au moment de l'Annonciation, quelle signification primordiale avaient les paroles de l'ange ? Et comment doit-on comprendre ce «règne» qui «n'aura pas de fin»?
Même si, à cet instant, elle s'est sentie dans la foi mère du «Messie-roi», elle a cependant répondu: «Je suis la servante du Seigneur, qu'il m'advienne selon ta parole» (Lc 1, 38). Dès ce premier moment, Marie a professé avant tout son «obéissance de la foi», elle s'en remet au sens que donnait aux paroles de l'Annonciation celui dont elles provenaient: Dieu lui-même.
16. Toujours sur cette route de l'«obéissance de la foi», Marie entend peu après d'autres paroles, celles que prononce Syméon au temple de Jérusalem. On était déjà au quarantième jour après la naissance de Jésus, lorsque, suivant la prescription de la Loi de Moïse, Marie et Joseph «emmenèrent l'enfant à Jérusalem pour le présenter au Seigneur» (Lc 2, 22). La naissance avait eu lieu dans des conditions de pauvreté extrême. Luc nous apprend en effet que lorsque Marie se rendit à Bethléem avec Joseph à l'occasion du recensement de la population ordonné par les autorités romaines, n'ayant pas trouvé de «place à l'auberge», elle enfanta son Fils dans une étable et «le coucha dans une crèche» (cf. Lc 2, 7).
Un homme juste et craignant Dieu, du nom de Syméon, apparaît en ce commencement de «l'itinéraire» de la foi de Marie. Ses paroles, suggérées par l'Esprit Saint (cf Lc 2, 25-27), confirment la vérité de l'Annonciation. En effet, nous lisons qu'il «reçut dans ses bras» l'enfant qui- suivant la consigne de l'ange- «fut appelé du nom de Jésus» (cf. Lc 2, 21). Le discours de Syméon est accordé au sens de ce nom qui veut dire Sauveur: «Dieu est le salut». S'adressant au Seigneur, il s'exprime ainsi: «Mes yeux ont vu ton salut, que tu as préparé à la face de tous les peuples, lumière pour éclairer les nations et gloire de ton peuple Israël» (Lc 2, 30-32). Au même moment, Syméon s'adresse aussi à Marie en disant: «Vois! cet enfant doit amener la chute et le relèvement d'un grand nombre en Israël; il doit être un signe en butte à la contradiction -afin que se révèlent les pensées intimes de bien des cœurs»; et il ajoute en s'adressant directement à Marie: «Et toi-même, une épée te transpercera l'âme!» (Lc 2, 34-35). Les paroles de Syméon mettent dans une nouvelle lumière l'annonce que Marie a entendue de l'ange: Jésus est le Sauveur, il est «lumière pour éclairer» les hommes. N'est-ce pas cela qui a été manifesté, en quelque sorte, la nuit de Noël, quand les bergers sont venus à l'étable (cf. Lc 2, 8-20)? N'est-ce pas cela qui devait être manifesté davantage encore lorsque vinrent des Mages d'Orient (cf. Mt 2, 1-12)? Cependant, dès le début de sa vie, le Fils de Marie, et sa Mère avec lui, éprouveront aussi en eux-mêmes la vérité des autres paroles de Syméon: «Un signe en butte à la contradiction» (Lc 2, 34). Ce que dit Syméon apparaît comme une seconde annonce faite à Marie, car il lui montre la dimension historique concrète dans laquelle son Fils accomplira sa mission: dans l'incompréhension et dans la souffrance. Si, d'une part, une telle annonce confirme sa foi dans l'accomplissement des promesses divines du salut, d'autre part, elle lui révèle aussi qu'elle devra vivre l'obéissance de la foi dans la souffrance aux côtés du Sauveur souffrant, et que sa maternité sera obscure et douloureuse. Et de fait, après la visite des Mages, après leur hommage («se prosternant, ils lui rendirent hommage»), après l'offrande des présents (cf. Mt 2, 11), Marie avec l'enfant dut fuir en Egypte sous la protection attentive de Joseph, parce que «Hérode recherchait l'enfant pour le faire périr» (cf. Mt 2, 13). Et ils devront rester en Egypte jusqu'à la mort d'Hérode (cf. Mt 2, 15).
17. Après la mort d'Hérode, quand la sainte Famille retourne à Nazareth, commence la longue période de la vie cachée. «Celle qui a cru en l'accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur» (Lc 1, 45) vit chaque jour le sens de ces paroles. Le Fils qu'elle a appelé du nom de Jésus est quotidiennement auprès d'elle; donc, à son contact, elle utilise certainement ce nom qui, d'ailleurs, ne pouvait provoquer aucune surprise car il était en usage en Israël depuis longtemps. Toutefois, Marie sait que celui qui porte le nom de Jésus a été appelé par l'ange «Fils du Très-Haut» (cf. Lc 1, 32). Marie sait qu'elle l'a conçu et enfanté «sans connaître d'homme», par l'Esprit Saint, avec la puissance du Très-Haut qui l'a prise sous son ombre (cf. Lc 1, 35), de même qu'au temps de Moïse et des Pères la nuée voilait la présence de Dieu (cf. Ex 24, 16; 40, 34-35; 1 R 8, 10-12). Marie sait donc que le Fils qu'elle a enfanté dans sa virginité est précisément ce «Saint», «le Fils de Dieu» dont l'ange lui a parlé.
Pendant les années de la vie cachée de Jésus dans la maison de Nazareth, la vie de Marie, elle aussi, est «cachée avec le Christ en Dieu» (cf Col 3, 3) dans la foi. En effet, la foi est un contact avec le mystère de Dieu. Constamment, quotidiennement, Marie est en contact avec le mystère ineffable de Dieu fait homme, mystère qui dépasse tout ce qui a été révélé dans l'Ancienne Alliance. Dès le moment de l'Annonciation, l'esprit de la Vierge-Mère a été introduit dans la «nouveauté» radicale de la révélation que Dieu fait de lui-même, et elle a pris conscience du mystère. Elle est la première de ces «petits» dont Jésus dira un jour: «Père, ... tu as caché cela aux sages et aux intelligents et tu l'as révélé aux tout-petits» (Mt 11, 25). En effet, «nul ne connaît le Fils si ce n'est le Père» (Mt 11, 27). Comment Marie peut-elle donc «connaître le Fils»? Elle ne le connaît certes pas comme le Père; et pourtant elle est la première de ceux auxquels le Père «a voulu le révéler» (cf. Mt 11, 26-27; 1 Co 2, 11). Néanmoins si, dès le moment de l'Annonciation, le Fils, lui dont seul le Père connaît la vérité entière, lui a été révélé comme celui que le Père engendre dans l'éternel «aujourd'hui» (cf. Ps 2, 7), Marie, sa Mère, est au contact de la vérité de son Fils seulement dans la foi et par la foi! Elle est donc bienheureuse parce qu'elle «a cru» et parce qu'elle croit chaque jour, à travers toutes les épreuves et les difficultés de la période de l'enfance de Jésus, puis au cours des années de la vie cachée à Nazareth où il «leur était soumis» (Lc 2, 51): soumis à Marie, et à Joseph également, parce que ce dernier lui tenait lieu de père devant les hommes; c'est pourquoi le Fils de Marie était considéré par les gens comme «le fils du charpentier» (Mt 13, 55).
Ainsi la Mère de ce Fils, gardant la mémoire de ce qui a été dit à l'Annonciation et au cours des événements suivants, porte en elle la «nouveauté» radicale de la foi, le commencement de la Nouvelle Alliance. C'est là le commencement de l'Evangile, c'est-à-dire de la bonne nouvelle, de la joyeuse nouvelle. Il n'est cependant pas difficile d'observer en ce commencement une certaine peine du cœur, rejoignant une sorte de «nuit de la foi» - pour reprendre l'expression de saint Jean de la Croix-, comme un «voile» à travers lequel il faut approcher l'Invisible et vivre dans l'intimité du mystère . C'est de cette manière, en effet, que Marie, pendant de nombreuses années, demeura dans l'intimité du mystère de son Fils et avança dans son itinéraire de foi, au fur et à mesure que Jésus «croissait en sagesse ... et en grâce devant Dieu et devant les hommes» (Lc 2, 52). La prédilection que Dieu avait pour lui se manifestait toujours plus aux yeux des hommes. La première des créatures humaines admises à la découverte du Christ fut Marie qui vivait avec Joseph dans la même maison à Nazareth.
Toutefois, après que Jésus, agé de douze ans, eut été retrouvé dans le temple, et que, à la question de sa mère: «Pourquoi nous as-tu fait cela?», il eut répondu: «Ne savez-vous pas que je dois être aux affaires de mon Père?», l'évangéliste ajoute: «Mais eux (Joseph et Marie) ne comprirent pas la parole qu'il venait de leur dire» (Lc 2, 48-50). Jésus avait donc conscience de ce que «seul le Père connaît le Fils» (cf. Mt 11, 27), à tel point que même celle à qui avait été révélé plus profondément le mystère de sa filiation divine, sa Mère, ne vivait dans l'intimité de ce mystère que par la foi! Se trouvant aux côtés de son Fils, sous le même toit, et «gardant fidèlement l'union avec son Fils», elle «avançait dans son pèlerinage de foi», comme le souligne le Concile . Et il en fut de même au cours de la vie publique du Christ (cf. Mc 3, 21-35), de sorte que, de jour en jour, s'accomplissait en elle la bénédiction prononcée par Elisabeth à la Visitation: «Bienheureuse celle qui a cru».
18. Cette bénédiction atteint la plénitude de son sens lorsque Marie se tient au pied de la Croix de son Fils (cf. Jn 19, 25). Le Concile déclare que cela se produisit «non sans un dessein divin»: «Souffrant cruellement avec son Fils unique, associée d'un coeur maternel à son sacrifice, donnant à l'immolation de la victime, née de sa chair, le consentement de son amour», Marie «garda fidèlement l'union avec son Fils jusqu'à la Croix» : l'union par la foi, par la foi même avec laquelle elle avait accueilli la révélation de l'ange au moment de l'Annonciation. Elle s'était alors entendu dire aussi: «Il sera grand... Le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David, son père; il régnera sur la maison de Jacob pour les siècles et son règne n'aura pas de fin» (Lc 1, 32-33).
Et maintenant, debout au pied de la Croix, Marie est témoin, humainement parlant, d'un total démenti de ces paroles. Son Fils agonise sur ce bois comme un condamné. «Objet de mépris, abandonné des hommes, homme de douleur..., méprisé, nous n'en faisions aucun cas», il était comme détruit (cf. Is 53, 3-5). Comme elle est grande, comme elle est alors héroïque l'obéissance de la foi dont Marie fait preuve face aux «décrets insondables» de Dieu! Comme elle «se livre à Dieu» sans réserve, dans «un complet hommage d'intelligence et de volonté» à celui dont «les voies sont incompréhensibles» (cf. Rm 11, 33)! Et aussi comme est puissante l'action de la grâce dans son âme, comme est pénétrante l'influence de l'Esprit Saint, de sa lumière et de sa puissance!
Par une telle foi, Marie est unie parfaitement au Christ dans son dépouillement. En effet, «le Christ Jésus, ... de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu. Mais il s'anéantit lui-même, prenant condition d'esclave, et devenant semblable aux hommes»: sur le Golgotha justement, «il s'humilia plus encore, obéissant jusqu'à la mort, et à la mort sur une croix!» (cf. Ph 2, 5-8). Au pied de la Croix, Marie participe par la foi au mystère bouleversant de ce dépouillement. C'est là, sans doute, la «kénose» de la foi la plus profonde dans l'histoire de l'humanité. Par la foi, la Mère participe à la mort de son Fils, à sa mort rédemptrice; mais, à la différence de celle des disciples qui s'enfuyaient, sa foi était beaucoup plus éclairée. Par la Croix, Jésus a définitivement confirmé sur le Golgotha qu'il était le «signe en butte à la contradiction» prédit par Syméon. En même temps s'accomplissaient là les paroles qu'il avait adressées à Marie: «Et toi-même, une épée te transpercera l'âme» .
19. Oui vraiment, «bienheureuse celle qui a cru»! Ici, au pied de la Croix, ces paroles qu'Elisabeth avait prononcées après l'Annonciation semblent retentir avec une éloquence suprême et leur force devient profondément pénétrante. Depuis la Croix, pour ainsi dire du cœur même du mystère de la Rédemption, le rayonnement de cette bénédiction de la foi s'étend et sa perspective s'élargit. Elle rejaillit «jusqu'au commencement» et, comme participation au sacrifice du Christ, nouvel Adam, elle devient, en un sens, la contrepartie de la désobéissance et de l'incrédulité comprises dans le péché des premiers parents. C'est ce qu'enseignent les Pères de l'Eglise et, en particulier, saint Irénée cité par la Constitution Lumen gentium: «Le nœud de la désobéissance d'Eve a été dénoué par l'obéissance de Marie, car ce que la vierge Eve avait lié par son incrédulité, la Vierge Marie l'a délié par sa foi» . A la lumière de cette comparaison avec Eve , les Pères -comme le rappelle aussi le Concile- donnent à Marie le titre de «Mère des vivants» et ils disent souvent: «Par Eve la mort, par Marie la vie» .
C'est donc à juste titre que nous pouvons trouver dans la parole «Bienheureuse celle qui a cru» en quelque sorte une clé qui nous fait accéder à la réalité intime de Marie, de celle que l'ange a saluée comme «pleine de grâce». Si elle a été éternellement présente dans le mystère du Christ parce que «pleine de grâce», par la foi elle y participa dans toute l'ampleur de son itinéraire terrestre: «elle avanca dans son pèlerinage de foi» et, en même temps, de manière discrète mais directe et efficace, elle rendait présent aux hommes le mystère du Christ. Et elle continue encore à le faire. Par le mystère du Christ, elle est aussi présente parmi les hommes. Ainsi, par le mystère du Fils, s'éclaire également le mystère de la Mère.
Source
Illustration
L’Annonciation
Ensemble, Roger de la Pasture ?
(Tournai, 199/1400 – Bruxelles, 1464)
( Bois H. 0,86 ; L. 0,93 m ) Paris, musée du Louvre, Inv. 1982.
Photographie en lumière directe.
© C2RMF, Odile Guillon
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mardi, 25 mars 2008
Et si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est donc vaine, et votre foi aussi est vaine.
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Epitre de saint Paul aux Corinthiens 15. 1-58
- Illustration
Fresque de Fra Angelico
Florence
couvent San Marco, XVe siècle
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dimanche, 23 mars 2008
Dimanche de Pâques - Résurrection de Notre Seigneur Jésus-Christ
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samedi, 22 mars 2008
Samedi Saint
La nuit a passé sur le sépulcre où repose le corps de l'Homme-Dieu. Mais si la mort triomphe au fond de cette grotte silencieuse, si elle tient dans ses liens celui qui donne la vie à tous les êtres, son triomphe sera court. Les soldats ont beau veiller à l'entrée du tombeau, ils ne retiendront pas le divin captif, quand il prendra son essor. Les saints Anges adorent, dans un respect profond, le corps inanimé de celui dont le sang va « pacifier le ciel et la terre ». Ce corps séparé de l'âme pour un court intervalle est demeuré uni au Verbe divin ; l'âme qui a cessé un moment de l'animer, n'a point non plus perdu son union avec la personne du Fils de Dieu. La divinité reste unie même au sang épanché sur le Calvaire, et qui doit rentrer dans les veines de l'Homme-Dieu, au moment de sa prochaine résurrection.
Nous aussi, approchons de ce tombeau, et vénérons à notre tour la froide dépouille du Fils de Dieu. Nous comprenons maintenant les effets du péché. « C'est par le péché que la mort est entrée dans le monde et qu'elle a passé dans tous les hommes. » Jésus, « qui n'a point connu le péché», a cependant permis à la mort d'étendre jusque sur lui son empire, afin d'en diminuer pour nous les horreurs et de nous rendre, en ressuscitant, cette immortalité que le péché nous avait ravie. Adorons dans toute notre reconnaissance ce dernier anéantissement du Fils de Dieu. Il avait daigné, dans son incarnation, prendre « la forme d'esclave » ; en ce moment, il est descendu plus bas encore. Le voilà sans vie et glacé dans un tombeau ! Si ce spectacle nous révèle l'affreux pouvoir de la mort, il nous montre bien plus encore l'immense et incompréhensible amour de Dieu pour l'homme. Cet amour n'a reculé devant aucun excès; et nous pouvons dire que si le Fils de Dieu s'est abaissé outre mesure, nous avons été d'autant plus glorifiés par ses abaissements. Qu'elle nous soit donc chère cette tombe sacrée qui doit nous enfanter à la vie; et après avoir rendu grâces au Fils de Dieu de ce qu'il a daigné mourir pour nous sur la Croix, remercions-le aussi d'avoir accepté pour nous l'humiliation du sépulcre.
Descendons maintenant dans Jérusalem, et visitons humblement la Mère des douleurs. La nuit aussi a passé sur son cœur affligé ; et les scènes lamentables de la journée n'ont cessé d'assiéger sa mémoire. Le fils de sa tendresse a été foulé sous les pieds des hommes, elle a vu couler son sang par torrents; et maintenant il est dans le tombeau, comme le dernier des mortels ! Que de larmes a versées déjà la fille de David durant ces longues heures ; et son fils ne lui est pas rendu encore ! Près d'elle, Madeleine, toute brisée des secousses qu'elle a ressenties dans les rues de Jérusalem et sur le Calvaire, éclate en sanglots, muette de douleur. Elle aspire au lever du jour suivant pour retourner au tombeau, et revoir les restes de son cher maître. Les autres femmes, moins aimées que Madeleine, mais cependant chères à Jésus, elles qui ont bravé les Juifs et les soldats pour l'assister jusqu'à la fin, entourent avec discrétion l'inconsolable mère, et songent aussi à soulager leur propre douleur, en allant avec Madeleine lorsque le Sabbat sera écoulé, de poser dans le sépulcre le tribut de leur amour et de leurs parfums.
Jean, le fils d'adoption, le bien-aimé de Jésus, pleure sur le Fils et sur la mère. D'autres apôtres, des disciples, Joseph d'Arimathie, Nicodème, visitent tour à tour cette maison de deuil. Pierre, dans l'humilité de son repentir, n'a pas craint de reparaître aux regards de la Mère de miséricorde. On s'entretient à voix basse du supplice de Jésus, de l'ingratitude de Jérusalem. La sainte Eglise, dans l'Office de cette nuit, nous suggère quelques traits des entretiens de ces hommes qu'une si terrible catastrophe a ébranlés jusqu'au fond de l'âme. « C'est donc ainsi, disent-ils, que meurt le juste, et personne ne s'en émeut! Il a disparu devant l'iniquité; semblable à l'agneau, il n'a pas ouvert la bouche; il a été enlevé au milieu des angoisses ; mais son souvenir est un souvenir de paix.»
Ainsi parlent ces hommes fidèles, pendant que les femmes, en proie à leur douleur, songent aux soins des funérailles. La sainteté, la bonté, la puissance, les douleurs et la mort de Jésus, tout est présent à leur pensée ; mais sa résurrection qu'il a annoncée et qui ne doit pas tarder, ne leur revient pas en souvenir. Marie seule vit dans cette attente certaine. L'Esprit-Saint dit de la femme forte : « Durant la nuit, sa lampe ne s'éteint jamais» ; cette parole s'accomplit aujourd'hui en la Mère de Jésus. Son cœur ne succombe pas, parce qu'elle sait que bientôt la tombe doit rendre son fils à la vie. La foi de la résurrection du Sauveur, cette foi sans laquelle, comme dit l'Apôtre, notre religion serait vaine, est, pour ainsi dire, concentrée dans l’âme de Marie. La Mère de la Sagesse conserve ce dépôt précieux; et de même qu'elle a tenu dans ses chastes flancs celui que le ciel et la terre ne peuvent contenir, ainsi aujourd'hui, par sa croyance ferme et constante aux paroles de son fils, elle résume en elle-même toute l'Eglise. Sublime journée du Samedi qui, au milieu de toutes ses tristesses, vient encore ajouter aux grandeurs de Marie ! La sainte Eglise en garde à jamais le souvenir; et c'est pour cela que, désirant consacrer à sa grande Reine un jour spécial chaque semaine, elle lui a dédie pour toujours le Samedi.
Mais l'heure est venue de se rendre à la maison de Dieu. Les cloches ne retentiront pas encore ; mais les mystères de la sainte Liturgie qui doivent remplir cette matinée n'en appellent pas moins les fidèles aux plus touchantes émotions. Conservons le souvenir de celles que nous venons de ressentir au sépulcre et aux pieds de la Mère des douleurs, et disposons nos âmes aux saintes jouissances que la foi nous prépare.
Illustration
Hans Holbein dit le jeune,
Le Christ mort, 1521,
Bâle, Kunstmuseum, Öffentliche Kunstsammlung.
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