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vendredi, 26 mars 2010

Genèse d'un délit

 

La révolution des années Soixante

 

 

Le scandale de la pédophilie a toujours existé; ce qui lui a donné des proportions énormes, c'est le virage culturel d'il y a un demi-siècle. Benoît XVI l'a écrit dans sa lettre aux catholiques d'Irlande, que commentent deux cardinaux et un sociologue

par Sandro Magister

 

 



ROME, le 25 mars 2010 - La loi et la grâce. La main de Dieu parvient là où la justice terrestre n'arrive pas. Dans sa lettre du 19 mars, Benoît XVI a ordonné aux catholiques d'Irlande ce qu'aucun pape de l'époque moderne n'a jamais ordonné à toute l'Église d'un pays.

Il leur a enjoint non seulement de déférer les coupables devant les tribunaux canoniques et civils mais aussi de se mettre collectivement en état de pénitence et de purification. Et cela non pas dans le secret de leurs consciences mais de manière publique, sous les yeux de tous, y compris leurs adversaires les plus implacables et les plus moqueurs. Jeûne, prière, lecture de la Bible et activités caritatives tous les vendredis à partir de maintenant jusqu'à Pâques de l'année prochaine. Confession sacramentelle fréquente. Adoration continuelle de Jésus - lui-même "victime de l'injustice et du péché" - devant la sainte hostie exposée sur les autels des églises. Et pour tous les évêques, prêtres et religieux, sans exception, une période spéciale de "mission", un long et rude parcours d'exercices spirituels pour une révision de vie radicale.

C’est une décision audacieuse qu’a prise là le pape Benoît XVI. Parce que le prophète Jonas lui-même ne croyait plus que Dieu pardonnerait à Ninive pour ses péchés, en dépit de la cendre de la pénitence et des sacs dont tous étaient couverts, depuis le roi jusqu’à la dernière des bêtes.

Et aujourd’hui encore beaucoup de gens concluent que l’Église reste condamnée irrémédiablement, même après la lettre dans laquelle le pape lui-même se déclare plein de honte et de remords à cause des abominations commises sur des enfants par certains prêtres, vis-à-vis desquelles certains évêques ont fait preuve d’une négligence coupable.

Et pourtant le pardon de Dieu est descendu même sur Ninive et le sceptique Jonas a dû revenir sur son opinion.  Ce prophète, Michel-Ange l’a justement représenté sur la partie supérieure du mur derrière l’autel de la Chapelle Sixtine, pour montrer que le pardon de Dieu est la clé de tout, depuis la création du monde jusqu’au jugement dernier.

Dimanche 21 mars, tandis que l’on donnait lecture de sa lettre dans les églises d'Irlande, Benoît XVI a commenté, pour les fidèles réunis sur la place Saint-Pierre au moment de l'Angélus, le pardon de Jésus à la femme adultère : "Il sait ce qu’il y a dans le cœur de chaque être humain, il veut condamner le péché, mais sauver le pécheur et démasquer l'hypocrisie". L'hypocrisie de ceux qui voulaient lapider la femme, bien qu’étant eux-mêmes les premiers à pécher.

Intransigeance vis-à-vis du péché, "en commençant par le nôtre", et miséricorde vis-à-vis des personnes. Telle est la leçon que Joseph Ratzinger veut appliquer à l’affaire irlandaise et, plus largement, à l’Eglise tout entière.

D’un côté, les rigueurs de la loi. Le prix de la justice devra être payé intégralement. Les diocèses, les séminaires, les congrégations religieuses où l’on a laissé se commettre des méfaits sont avertis : des visiteurs apostoliques vont venir du Vatican pour découvrir ce qui s’est passé et, même là où il n’y aura pas lieu de faire intervenir la justice civile, la discipline canonique punira ceux qui auront été négligents.

Mais, en même temps, le pape allume la lumière de la grâce. Il ouvre la porte du pardon de Dieu même à ceux qui se sont rendus coupables des pires abominations, s’ils se repentent sincèrement.

Quant à ceux qui se tiennent au premier rang des accusateurs, ceux qui sont les plus armés de pierres contre l’Église, aucun d’entre eux n’est sans péché. Pour ceux qui exaltent la sexualité comme pur instinct, libre de toute entrave, il est difficile de condamner ensuite tout abus qui en est fait.

La tragédie de certains prêtres et religieux, a écrit Benoît XVI dans sa lettre pastorale, a aussi été de céder à "des façons de penser et de considérer les réalités séculières sans référence suffisante à l’Évangile" si répandues, au point d’en arriver à justifier l'injustifiable.

Une faiblesse qui ne peut certainement pas être reprochée à Ratzinger évêque et pape, même par ses adversaires les plus acharnés, s’ils sont sincères.

 

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